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La loi applicable

Les ‘Pavillons de complaisances électroniques’ sont un risque indéniable du commerce électronique (expression de Me Itéanu).Le but affiché est de contourner les lois auxquelles sont soumis les clients ou consommateurs d’un pays cible .Ce problème a été précédemment évoqué dans le cadre des services audiotex en Europe.

Dans cette hypothèse, le commerçant peu scrupuleux cherche intentionnellement à se placer sous l’empire d’une loi sachant qu’elle lui est des plus favorable.

L’E.I.J.A. (European Information Industry Association) considère que les services ‘en ligne’ sont soumis à la loi du pays ‘où ils peuvent être consultés’ c’est à dire la loi de l’utilisateur.

Le caractère mondial des réseaux internationaux de communication rend plus complexe l’analyse des droits et obligations de chacun.

De plus, l’apparition de notions nouvelles telles que l’emplacement du serveur, la présence de nouveaux intermédiaires -fournisseurs d’accès, de propriétaire de galeries commerciales ou de bouquet de services- sont à ajouter aux critères habituels de lieux d’établissement ou de résidence habituelle des parties.

Toutefois, des réponses existent et méritent un examen au cas par cas.

Je reprendrai ci-après des grands principes, qui ne doivent pas faire oublier l’intérêt d’ un examen particulier.

Il échet de préciser également que la question de la loi applicable ne se pose pas dans toutes les situations.

1.Exclusion de la question de la loi applicable

La question ne se pose pas toujours.

Le droit administratif concerne les relations administrées (le commerçant) et Administration.

Le droit pénal français s’applique chaque fois que la victime d’un délit prévu et réprimé par le Code Pénal d’une peine d’emprisonnement sera de nationalité française au moment de la commission de l’infraction et quelque soit la nationalité du ‘délinquant’ et du lieu de réalisation de l’infraction.

Par exemple, le commerçant, quelque soit sa nationalité et même s’il dispose d’un serveur basé à l’étranger qui enfreint les droits d’un auteur de nationalité française, est passible du délit de contrefaçon par application de la loi pénale française (art.L113-7 NCP).

A l’inverse, les lois dites de police s’appliquent de façon impérative.

La recherche de la loi applicable ne peut avoir pour effet l’exclusion du bénéfice des lois de police.

Peuvent être qualifiées de loi de police les principales dispositions du Code de la Consommation.

Par conséquent, un consommateur ne peut pas en France être spolié de ses droits.Si le consommateur est français, s’appliquera le Code de la Consommation.

Ainsi, entre un consommateur de nationalité française domicilié en France et une société commerciale française, quelque soit le lieu d’emplacement du serveur, la loi française s’applique.

2. La question de la loi applicable se pose quand le contrat est international

Est international le contrat qui présente des éléments d’extranéité, c’est-à-dire au sens de la jurisprudence, quand il met en cause les intérêts du commerce international.

Si le juge constate la condition d’extranéité remplie, il va devoir se prononcer sur la question de savoir quelle est la loi nationale applicable et surtout si la loi française s’applique.

En effet, une loi nationale s’applique forcément.

La Cour de Cassation, en droit français, a énoncé que tout contrat, fut-il international, est nécessairement rattaché à la loi d’un Etat auquel il se soumet.

Les traités bilatéraux et multinationaux en Droit International Privé permettent de résoudre les divergences entre les législations.

(voir art.55 de la Constitution qui proclame le principe de la supériorité des Traités sur la loi nationale)

En matière de commerce électronique, doivent être examinées :

La convention de Rome du 19/06/1980 sur la loi applicable aux obligations contractuelles

La loi d’un Etat peut être désignée bien que cet Etat ne soit pas signataire, il n’y a pas d’obligation de réciprocité.

Elle s’applique dans ‘les situations comportant un conflit de loi aux obligations contractuelles’, c’est-à-dire à tous contrats, toutes conventions quelque soit leur objet ou leur forme, hormis quelques exceptions comme le contrat d’assurance.

La convention de la Haye du 15/06/1955 sur la loi applicable aux ventes à caractère intenational d’objets mobiliers corporels

Cette convention est plus restreinte quant à son objet. Elle ne s’applique qu’aux contrats dont les deux parties sont situées sur le territoire de l’un des pays signataires.

Ces conventions posent les solutions suivantes :

Le principe de la primauté de la loi désignée au contrat prévaut.

Si les parties ont désigné une loi applicable, elle s’appliquera.

A défaut, le contrat sera localisé en fonction d’indices ( voir la convention de Rome, art.3 ) tels que la référence à un système juridique déterminé, la référence ponctuelle à une loi, une clause attributive de compétence ou à la langue du contrat.

L’article 4 prévoit que si les circonstances de la cause sont insuffisantes, un mécanisme de présomptions joue : ‘ la loi du pays avec lequel il présente les liens les plus étroits’, c’est-à-dire ‘la loi du pays où la partie qui doit fournir la prestation caractéristique a au moment de la conclusion du contrat sa résidence habituelle’.

La prestation caractéristique de la vente est la délivrance de la chose, d’où l’application de la loi du vendeur.

Néanmoins ces règles ne peuvent recevoir application dans le cadre d’une relation avec le consommateur.

3. Droit applicable au consommateur

Le consommateur est défini par la Convention de Rome comme celui qui acquiert un bien, un service ou un financement pour une telle fourniture ‘pour un usage pouvant être considéré comme étranger à son activité professionnelle’.

L’article 5-1 de la Convention de Rome dispose que ‘le choix de la loi applicable par les parties ne peut avoir pour résultat de priver le consommateur de la protection que lui assurent les dispositions impératives de la loi du pays dans lequel il a sa résidence habituelle’ , notamment ‘ si la conclusion du contrat a été précédée dans ce pays (…) d’une publicité et si le consommateur a accompli dans ce pays les actes nécessaires à la conclusion du contrat’ (cf développements çi-dessus sur la notion de loi de police).

Le commerce électronique doit être considéré comme publicité. La difficulté se situe au niveau de l’appréciation de son lieu. S’agit-il du pays du consommateur, du lieu de l’établissement du commerçant, du serveur ?

Je considère que sera appliquée la loi du pays du consommateur.

4. Conflits de juridiction

Le problème de la loi applicable ne se pose qu’après avoir répondu à la question de la juridiction compétente.

Le juge saisi se pose toujours la question préalable de sa compétence.

En droit français, les articles 14 et 15 du Code Civil ainsi que la Convention de Bruxelles du 27/09/68 traitent de conflits de juridiction.

Sur le plan international, les prorogations conventionnelles de compétences sont admises.

Par ces clauses, les parties désignent le tribunal compétent.

La Cour de Cassation considère que ‘de telles clauses prorogeant la compétence internationale sont licites quand il s’agit d’un litige international’.

La même réserve doit être apportée que précédemment : une clause attributive de compétence ne peut être opposée à un consommateur.

Par conséquent, il ressort de cette analyse que l a localisation du serveur est en théorie sans incidence sur le choix de la loi applicable.

La majorité de la doctrine est de cet avis. Néanmoins, d’autres auteurs sont d’un avis différent .Leur raisonnement repose sur le comportement du consommateur, sur la démarche principale réalisée par l’Internaute, le client potentiel est donc actif.

De cette analyse, ce courant de doctrine en tire la conséquence suivante : la loi applicable à la présentation et au contenu de l’offre est la loi du lieu de localisation du serveur.L’autre conséquence de cette analyse tient aux mailings.

Dans l’hypothèse particulière où l’offre de produits ou de service est faite par mailing électronique, le consommateur fait alors l’objet d’une sollicitation active par courrier électronique.Il n’est pas possible de retenir alors comme loi applicable la loi de l’annonceur.La loi applicable est celle où l’offre est faite, dans cette hypothèse au lieu de la boîte aux lettres.Toutefois, cette analyse n’est pas celle communément partagée.