• Méthodologie Agile : difficile d’élaborer un cadre contractuel adapté -fr 
Nos publications

Méthodologie Agile : difficile d’élaborer un cadre contractuel adapté

Le succès de la gestion de projets de développement en informatique inspirée des méthodes Agile implique de se poser la question de l’accompagnement contractuel adapté à ce type de pratique.

Se basant sur le manifeste Agile dévoilé en 2001, cette méthodologie s’appuie sur un certain nombre de valeurs et de principes, parmi lesquels figure notamment le fait de privilégier la collaboration avec le client plutôt que la contractualisation des relations, ou l’acceptation du changement plutôt que la conformité au plan.

Ce simple rappel permet d’envisager les difficultés qui se poseront aux juristes amenés à définir le cadre juridique applicable au développement d’un projet informatique reposant sur ces principes.

Ainsi, là où le juriste sera tenté d’imposer un calendrier comprenant, notamment, une date limite de livraison assortie, le cas échéant, de pénalités de retard dissuasives, le gestionnaire de projet Agile mettra, quant à lui, en avant l’adaptabilité, la réactivité et l’adaptation au changement, devant laisser au client la possibilité de faire évoluer ses besoins tout au long du projet.

De même, alors que le juriste est habitué à travailler avec un budget défini, le projet Agile s’accoutume mal de la rigidité d’un tel cadre, permettant plus difficilement de faire évoluer le budget en fonction de l’orientation prise par le projet.

A titre d’illustration, la méthode SCRUM, comptant parmi les principales méthodes Agile utilisées en France, favorise l’intervention du client à tout moment d’un sprint (période de durée fixe aboutissant à la livraison d’un produit partiel fonctionnel), afin de compléter ou modifier les fonctionnalités attendues du logiciel.

En réaction, il appartiendra au juriste de distinguer, dans le contrat, ce qui relève des évolutions inhérentes à la méthodologie elle-même, de ce qui pourrait être considéré comme des demandes d’évolution à part entière, justifiant l’établissement d’un chiffrage budgétaire distinct.

En définitive, la prise en compte, dans le travail de rédaction contractuelle, des spécificités propres aux méthodologies Agile, impose aux juristes d’abandonner leurs réflexes et le recours habituels à des trames-type non adaptées à ce type de projet, pour privilégier l’émergence d’une forme contractuelle spécifique, souple, adaptable et garante, néanmoins, de l’absence de dérive au-delà du raisonnable, tant sur les plans temporel que budgétaire du projet engagé.

Il s’agit là d’un chantier particulièrement intéressant pour les avocats et juristes dans les années à venir, dont les compétences seront grandement sollicitées en termes d’inventivité et de rigueur.

Blandine Poidevin
Viviane Gelles

Avocats
Cabinet Jurisexpert