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Commentaires sur la directive européenne relative aux droits d'auteur


DIRECTIVE 2001/29/CE DU 22/05/2001 RELATIVE A L’HARMONISATION DE CERTAINS ASPECTS DU DROIT D’AUTEUR ET DES DROITS VOISINS DANS LA SOCIETE DE L’INFORMATION.

Le but de cette directive est d’harmoniser les dispositions législatives des états membres sur les droits d’auteur et les droits voisins. Le cadre juridique harmonisé va permettre d’améliorer la sécurité juridique et d’assurer un niveau élevé de protection de la propriété intellectuelle. Ceci devient d’autant plus nécessaire que la société de l’information se développe rapidement et risque de porter atteinte à ces droits.

Les droits d’auteur sont composés de deux éléments : les droits moraux lesquels seront exercés en conformité avec le droit des états membres (en effet, ils sont exclus du champ d’application de la présente directive), et les droits patrimoniaux lesquels permettent à l’auteur d’autoriser ou d’interdire l’utilisation de l’œuvre et d’en tirer les bénéfices économiques de l’exploitation de cette œuvre.

La présente directive reprend des principes et des règles se trouvant dans des directives précédentes. En fait, elle développe ces principes et règles, et les intègre dans la perspective de la société de l’information.


1/Champ d’application de la directive
Cette directive traite de la protection juridique du droit d’auteur et des droits voisins dans le cadre du marché intérieur et accorde une certaine importance à la société de l’information tel que rappelé dans son article premier.

2/les principes

A / L’existence d’un droit exclusif.

Les articles 2, 3 et 4 de la directive fixent le droit exclusif, appartenant aux auteurs, artistes, producteurs et organismes de radiodiffusion, d’autoriser ou d’interdire :

– Selon l’article 2 : la reproduction de leur création (la directive définit le champ des actes couverts par le droit de production : œuvres, phonogrammes…)

– Selon l’article 3 : la communication au public de leur création et la mise à disposition au public de leur création (la communication au public s’entend comme couvrant toute communication au public non présent au lieu d’origine de la communication. Ce droit couvre toute transmission ou retransmission d’une œuvre au public, par fil ou sans fil, y compris la radiodiffusion.

Il ne couvre aucun autre acte. Le droit de mettre à la disposition du public des objets protégés, visé à l’article 3 §2, doit s’entendre comme couvrant tous les actes de mise à disposition du public qui n’est pas présent à l’endroit où l’acte de mise à disposition a son origine et doit s’entendre également comme ne couvrant aucun autre acte)

– Selon l’article4 : toute forme de distribution au public, par la vente ou autrement, de l’original de leurs œuvres ou de copies de ces dernières.

On peut s’attarder sur l’article 2 relatif au droit de reproduction. Cet article reprend quasiment la définition figurant dans la directive relative aux programmes d’ordinateur et celle relative à la protection des bases de données. Ici, l’élément de permanence ou non de la reproduction est clairement intégré, ce qui implique, en principe, que la reproduction provisoire et éphémère soit considéré comme un acte de reproduction soumis à autorisation du titulaire des droits. (Sous réserve de l’exception figurant à l’article 5§1 relatif aux reproductions provisoires, voir 3ème point.)

Donc, le principe est que tous les titulaires de droits reconnus par la directive ont le droit exclusif de mettre à disposition du public des œuvres protégées par le droit d’auteur ou tous autres objets protégés par voie de transmission interactives à la demande. Ces transmissions sont caractérisées par le fait que chacun peut y avoir accès de l’endroit et au moment qu’il aura choisi.

B/ La règle de l’épuisement des droits.

Il est fait référence à cette règle dans les articles 3 et 4.

Selon l’article3, ce droit exclusif n’est pas épuisé par l’acte de communication au public ou de mise à disposition du public. Et selon l’article 4, ce droit sera épuisé en cas de première vente ou de premier transfert de la propriété dans la communauté par le titulaire du droit ou avec son consentement. Ce qui signifie deux choses. Tout d’abord, si la première vente se fait hors CE, alors le droit ne sera pas épuisé.

Ensuite, si le droit est épuisé, alors l’auteur de ce droit n’aura plus la possibilité de contrôler la revente de l’objet.

La question de la règle de l’épuisement des droits ne se pose pas lorsqu’il s’agit de services en ligne. Tout les services en ligne constitue en fait un acte devant être soumis à autorisation dès lors que le droit d’auteur ou le droit voisin en dispose ainsi.

3/Les exceptions et les limitations.

A ce droit exclusif, il existe des exceptions et des limitations prévues à l’article 5 de la présente directive. Pour assurer le bon fonctionnement du marché intérieur suite au nouvel environnement électronique, les exceptions et les limitations vont être définies de manière plus harmonieuse par l’intermédiaire de la présente directive. (Peut-on vraiment parler d’harmonisation étant donné le nombre important d’exceptions et dont la plupart ne sont que facultatives, laissées à la discrétion des états membres ?) La directive contient une liste exhaustive des exceptions et limitations au droit de reproduction et au droit de communication au public.

A/ Les exceptions au droit de reproduction.

– L’exception obligatoire en matière de droit d’auteur :

Cette exception qui s’impose à tout état membre consiste à passer outre l’autorisation de l’auteur en matière d’actes de reproduction provisoires.

Une diffusion en réseau implique nécessairement une multitude d’actes de fixation provisoires à la fois sur les ordinateurs des utilisateurs et sur les serveurs et autres systèmes de transmission utilisés par les intermédiaires techniques. Les définitions nationales sur le droit de reproduction sont tellement larges qu’elles permettent de recouvrir les copies techniques provisoires.

La directive est intervenue sur ce point et elle a assoupli la portée des définitions par l’intermédiaire d’une exception permettant la circulation des œuvres et des prestations sur internet.

Donc, les actes de reproduction provisoires sont autorisés s’ils sont faits dans le but de permettre soit une transmission efficace dans un réseau entre les tiers par un intermédiaire, soit l’utilisation licite (c’est-à-dire lorsqu’elle autorisée par le titulaire du droit) d’un œuvre ou d’un objet protégé.

Il existe deux types de reproductions provisoires :

-les reproductions volatiles ou transitoires pour désigner les copies réalisées lors de la transmission des œuvres sur les réseaux électroniques

-les copies temporaires et techniques. Ici, il peut s’agir de copies provisoires réalisées lors de leur stockage : c’est le cas de la reproduction dans la mémoire vive de l’ordinateur des œuvres et prestations lors de leur consultation sur Internet. Il peut également s’agir de copie temporaire effectuée lors de l’opération de ‘ caching ‘.

Il existe deux type de caching.

Le premier type est réalisé par le navigateur utilisé par chaque utilisateur. Le logiciel de navigation réalise ainsi une copie de chaque page web consultée par l’utilisateur et la stocke sur le disque dur de la machine pendant une durée variable. A chaque fois que l’utilisateur veut se reconnecter à ce contenu, le navigateur active la copie du disque dur, ceci afin de permettre une consultation rapide des pages les plus utilisées par l’utilisateur.

C’est le cache client. Dans ce cas, la copie n’est parfois ni mise à jour, ni supprimée, et, de telle sorte, peut devenir quasi permanente. Le second type de caching est réalisé par le fournisseur d’accès Internet. Ce dernier dispose également d’une copie cache sur laquelle il installe une reproduction des sites les plus demandés dans le but de faciliter et d’accélérer la transmission de ces sites vers l’utilisateur, et par conséquent de diminuer le trafic sur le réseau. La durée de ces reproductions temporaires peut aller de quelques secondes à quelques jours.

La directive place ces copies provisoires dans la liste des exceptions au droit de reproduction. Et par conséquent, ces reproductions provisoires sont exemptées du droit de reproduction tel que prévu à l’article 2 de la présente directive.

– Les exceptions facultatives :

Il existe à coté de cette exception, des exceptions facultatives. En effet, la directive prévoit que les états membres peuvent prendre des exceptions à la reproduction de l’article 2. On peut citer plusieurs exemples : reproduction sur papier ou sur support similaire, reproduction pour une personne physique sur tous supports pour un usage privé, à des fins autres que commerciales… Toutes ces exceptions sont assorties d’une condition : les titulaires de droit doivent recevoir une compensation équitable afin de les indemniser de manière adéquate pour l’utilisation faite de leur œuvre ou de leur objet protégé.

B/ Les exceptions et les limitations au droit de reproduction et au droit de communication au public.

Les états membres ont la faculté de prévoir des exceptions et des limitations dans certains cas tels que l’utilisation à des fins exclusives d’illustration, d’enseignement ou de recherche scientifique… Ceci doit se faire toujours sous condition de compensation équitable et si c’est possible d’indiquer la source et le nom de l’auteur.

En conclusion de cette partie, on peut rappeler que lorsque ces exceptions ou limitations prévues par la directive sont applicables, ceci doit être fait dans le respect des obligations internationales. De plus, ces exceptions ou limitations ne sauraient être appliquées d’une manière qui cause un préjudice aux intérêts légitimes du titulaire de droits ou qui porte atteinte à l’exploitation normale de son œuvre ou de son objet.

4/La protection juridique.

A/ La protection juridique des mesures appropriées.

Selon l’article 6§2 de la directive, les états membres peuvent prévoir une protection juridique appropriée ( fait référence à la notion de proportionnalité, la protection ne doit pas interdire les dispositifs ou les activités qui ont, sur le plan commercial, un objet ou une utilisation autre que le contournement de la protection technique.) contre la fabrication, la distribution…à des fins commerciales…dans le but de contourner la protection des mesures techniques efficaces. Dans le §3 de ce même article, on y trouve la définition de ce que la directive entend par mesures techniques efficaces. En fait, il s’agit de tout dispositif permettant d’empêcher les actes non autorisés par le titulaire du droit d’auteur ou du droit voisin.

Donc, l’évolution technologique permettra au titulaire de droits de recourir à des mesures techniques destinées à empêcher ou à limiter les actes non autorisés par les titulaires d’un droit d’auteur, de droit voisin ou de droit sui generis sur une base de donnée. Et la protection juridique porte sur ces mesures techniques.

B/ Le régimes des droits.

L’évolution technologique facilitera la distribution d’œuvres (essentiellement sur les réseaux).Les titulaires des droits doivent fournir des informations relatives aux conditions et modalités d’utilisation de l’œuvre ou de l’objet protégé. Le risque est que les informations présentées sous forme électronique sur le régime des droits soient modifiées ou supprimées. La directive, dans son article 7, permet aux états membres de prévoir une protection juridique contre toutes personnes qui supprimeraient ou modifieraient ces informations. Ceci s’explique par l’existence du risque d’une atteinte à l’encontre d’un droit d’auteur ou d’un droit voisin du droit d’auteur.

5/Les sanctions en cas de violation.

Les états membres doivent prévoir des sanctions et des voies de recours contre les atteintes aux droits et obligations prévus par la présente directive et doivent prendre toutes les mesures nécessaires pour en garantir l’application. Ces sanctions se traduisent par des dommages et intérêts ou par la saisie du matériel concerné par l’infraction. Les services d’intermédiaires peuvent être utilisés par une personne pour porter atteinte à un droit d’auteur ou à un droit voisin. Dans ce cas, les titulaires des droits peuvent demander qu’une ordonnance sur requête soit rendue à l’encontre de cet intermédiaire.

En conclusion, les états membres doivent au plus tard le 22/12/2002, avoir transposé cette directive dans leur droit interne. Cette directive est entrée en vigueur au jour de sa publication au J.O., c’est-à-dire le 22/06/2001.