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Diffamation, exception de vérité et amnistie : un cocktail explosif.

Le Conseil constitutionnel a rendu le 7 juin dernier une décision importante dans le domaine du droit de la presse, et notamment de la diffamation.

Dans ce domaine, la personne poursuivie pour diffamation peut, dans certaines conditions, apporter la preuve du fait diffamatoire qu’elle allègue.

Par exemple, si une personne publie un article dans lequel elle écrit « l’élu de la ville de X est un voleur, il détourne les fonds publics », il s’agit de diffamation passible de sanction pénale. Elle peut toutefois s’exonérer de toute responsabilité si elle parvient à établir la preuve de ce qu’elle avance.

Toutefois, la loi sur la presse interdit de rapporter une telle preuve lorsque l’imputation se réfère à un fait constituant une infraction amnistiée ou prescrite, ou qui a donné lieu à une condamnation effacée par la réhabilitation ou la révision (article 35 c) de ce cette loi de 1881).

Le Conseil constitutionnel avait été saisi le 20 mars 2013 par la Cour de cassation d’une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) posée par M. Philippe B. qui soutenait que cette interdiction portait atteinte à la liberté d’expression et aux droits de la défense. Cette question était relative à la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit du c) de l’article 35 de la loi du 29 juillet 1881.

Dans sa décision, le Conseil a jugé que les dispositions concernant l’amnistie, la prescription de l’action publique, la réhabilitation et la révision n’avaient pas, par elles-mêmes, pour objet d’interdire qu’il soit fait référence à des faits qui ont motivé une condamnation amnistiée, prescrite ou qui a été suivie d’une réhabilitation ou d’une révision ou qu’il soit fait référence à des faits constituant une infraction amnistiée ou prescrite.

Dans le communiqué qu’il publie, le Conseil a rappelé que « la restriction à la liberté d’expression qui résulte du c) de l’article 35 vise sans distinction, tous les propos ou écrits résultant de travaux historiques ou scientifiques ainsi que les imputations se référant à des événements dont le rappel ou le commentaire s’inscrivent dans un débat public d’intérêt général. Dès lors le Conseil constitutionnel a jugé que, par son caractère général et absolu, cette interdiction porte à la liberté d’expression une atteinte qui n’est pas proportionnée au but poursuivi. Elle méconnaît donc l’article 11 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789. Cette déclaration d’inconstitutionnalité est applicable à toutes les imputations diffamatoires non jugées définitivement au jour de la publication de la présente décision ».